Les défaillances de sûreté des 19 centrales nucléaires françaises pointées par Bruxelles
Les tests de résistance nucléaires menés par l'Union européenne ont révélé des défaillances de sûreté, d'incidence variable, dans l'ensemble des centrales nucléaires françaises. Ce sont les principales conclusions d'un rapport du commissaire européen à l'énergie Günther Oettinger qui doit être présenté à la Commission mercredi 3 octobre, avant d'être dévoilé au public, jeudi, à Bruxelles.
Ce document de travail, qu'a pu consulter une partie de la presse, recense les "stress tests" menés depuis un an sur les 134 réacteurs du parc européen, répartis sur 68 sites dans 14 pays, pour tirer les leçons de la catastrophe de Fukushima en mars 2011. "Nos contrôles de sécurité ont été stricts, sérieux et menés en toute transparence. Ils ont permis de révéler ce qui allait bien et là où il fallait apporter des améliorations, a déclaré Günther Oettinger. En général, la situation est satisfaisante, mais nous ne devons avoir aucune complaisance."Aucune fermeture de réacteur ne serait demandée, mais les investissements nécessaires à la sûreté des centrales européennes atteindraient entre 10 milliards et 25 milliards d'euros. Soit entre 30 millions et 200 millions d'euros par réacteur. Cette évaluation des coûts n'est pas une surprise. Philippe Jamet, représentant français du Groupe des régulateurs européens dans le domaine de la sûreté nucléaire (ENSREG), qui a mené les tests, avait chiffré en juin entre 100 et 200 millions d'euros par réacteur le coûts des investissements pour la France.
LA FRANCE CIBLÉE
Avec 19 centrales et 58 réacteurs, l'Hexagone est particulièrement ciblée par les critiques. Sur les 11 points identifiés comme des défaillances ou des manques, la totalité des centrales sont en défaut sur cinq à sept points.
De manière générale, il est rappelé que les équipements de secours, comme les groupes électrogènes, ne sont pas assez protégés contre les séismes ou les inondations, contrairement aux réacteurs britanniques, allemands ou belges. Les centrales de l'Hexagone manquent par ailleurs d'instruments de mesure sismique adaptés aux exigences post-Fukushima. Ces carences avaient déjà été pointées par l'Autorité de sûreté nucléaire française dans son long rapport publié en juin et imposant des milliers de prescriptions aux exploitants.
Néanmoins, la centrale de Fessenheim, que François Hollande s'est engagé à fermer en 2016, "présente moins de mauvais points dans le tableau récapitulatif du document européen. Un exemple : les procédures prévues en cas d'accident grave sont jugées insuffisantes à Chooz et Cattenom, mais adéquates [dans la centrale alsacienne]". Toutes les centrales françaises sont toutefois équipées de recombineurs d'hydrogène, un équipement qui permet de prévenir des explosions d'hydrogène et qui fait défaut dans les 10 centrales du Royaume-Uni et cinq des six centrales espagnoles.
TENSIONS ENTRE PARIS ET BRUXELLES
Ces recommandations doivent être soumises aux dirigeants de l'UE lors du sommet des 18 et 19 octobre à Bruxelles. Avec l'ambition que les travaux de renforcement de la sûreté des sites européens soient effectués, au plus tard, d'ici à 2015.
"D'ores et déjà, le ton monte entre Paris et Bruxelles. Le commissaire en charge de l'énergie et Delphine Batho, la ministre de l'écologie et de l'énergie, ont eu un entretien houleux sur le sujet, lundi 1er octobre, à Paris. M. Oettinger s'est aussi entretenu avec Henri Proglio, le PDG d'EDF, le principal exploitant de centrales en France, livre Philippe Ricard, correspondant à Bruxelles, dans un article du Monde daté de mercredi 3 octobre. Les autorités françaises ont cherché, ces derniers jours, à atténuer la portée des conclusions préparées par les services de M. Oettinger. A Paris, on se méfie de toute tentative de centralisation par l'Europe de la régulation du secteur nucléaire."
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