Ecrire pour guérir
Write hard and clear about what hurts.
Hemingway
Depuis les années soixantes, une poignée de chercheurs ont clamé haut
et fort les vertus thérapeutiques du journal. Thérapeutes et médecins
le recommandent souvent à leurs patients et instinctivement, ceux qui
souffrent ressentent le besoin de l'écrire.
Pourquoi? Comment le journal guérit-il?
Maintenant, attention... Je ne suis ni psychologue, ni
thérapeute. Je ne prétendrai pas faire la preuve scientifique de quoi
que ce soit. Je parle seulement par expérience, et je me base également
sur mes lectures personnelles pour ouvrir des pistes de réflexion sur
un sujet qui me passionne mais sur lequel je ne suis pas spécialiste.
Si des psychologues, médecins et thérapeutes de toute obédience viennent
à prendre connaissance avec cette page et y notent des faiblesses, je
suis plus qu'ouverte au dialogue et
vous invite à me faire signe.
D'ailleurs, je n'ai trouvé que très peu de sources sur la
poésie-thérapie et la journal-thérapie au Québec et dans la francophonie
en général; leur intervention me fera donc d'autant plus plaisir!
Qu'est-ce que la journal-thérapie?
Kathleen Adams, psychothérapeute et fondatrice du
Center for Journal Therapy,
au Colorado, définit la journal-thérapie comme l'écriture des pensées
et des sentiments dans le but de régler ses problèmes personnels et d'en
venir à une meilleure compréhension de soi et des événements de sa vie.
Toujours d'après Kathleen Adams, l'écriture de nos réactions,
expériences et émotions permet de libérer une certaine tension et de
percevoir plus clairement notre cheminement. Tout un programme! La
journal-thérapie va donc beaucoup plus loin que l'écriture du journal
traditionnel, où l'on se contente d'écrire sa vie et les événements qui
la composent, sans travail éclairé et conscient sur soi.
Que l'on me comprenne; je ne cherche pas ici à impliquer que la
journal-thérapie vaut plus intrinsèquement que le journal traditionnel.
Aucun jugement de valeur ne sera établi ici. Je tiens simplement à
souligner que du point de vue de la croissance personnelle, la
journal-thérapie, l'écriture axée sur l'introspection et le
questionnement intérieur, va beaucoup plus loin.
Ceci étant dit, poursuivons.
On attribue le développement de la journal-thérapie, du moins ses
origines, au docteur Ira Progoff, un psychologue new-yorkais. Dans les
années soixante, celui-ci mit au point une technique qu'il baptisa
le Journal Intensif. Non seulement le docteur Progoff proposait-il
cette méthode à ses propres patients, mais il publia plusieurs ouvrages
sur la question (dont
At a Journal Workshop, paru en 1978) et des
ateliers furent proposés au grand public. Cette méthode connut
beaucoup de popularité et plus de deux cent mille personnes ont
participé à des ateliers de journal intime intensif.
La méthode du docteur Progoff implique, entre autres, un cartable
séparé en plusieurs sections, toutes de couleurs différentes,
permettant au diariste de sectionner son écriture par grands thèmes.
Les rêves, le travail, la famille, les relations amoureuses, la vie
intérieure et spirituelle faisaient tous l'objet de sections distinctes
du journal. Selon la prémisse de la méthode Progoff, diviser la vie
intérieure et extérieure du diariste en sections lui permet d'atteindre
des niveaux de conscience plus profonds et d'aller plus loin dans sa
compréhension de soi. Le nombre de sections utilisées dans cette
méthode permet de renforcer le processus d'exploration intérieure. On
utilise entre autres beaucoup le dialogue, la méditation et l'écriture
libre dans la méthode Progoff afin d'explorer les diverses dimensions de
la vie. D'autres sections incluent également l'imagerie et le travail
avec les rêves.
A peu près à la même époque, l'ouvrage de Tristine Rainer,
The New Diary,
vint également révolutionner la perception qu'avait le grand public du
journal intime. En donnant des pistes afin d'aller plus loin dans la
compréhension et l'exploration de soi, Rainer ouvrait de nouvelles
portes à la journal-thérapie. Le journal n'était plus qu'un sous-genre
littéraire, que l'on abandonnait une fois l'adolescence terminée; il
n'était plus l'apanage exclusif d'écrivains et de grands penseurs.
Désormais, il était accessible à tous et recelait des possibilités qu'on
avait autrefois ignorées. Rainer donna entre autres des moyens de
faire de son journal un outil de découverte personnelle mais également
de création et de guérison. Il s'agissait là d'un nouveau point de vue
sur le journal et l'écriture personnelle.
Dans les écoles, les professeurs entreprirent également
d'intégrer le journal à leurs cours. Non seulement le journal aidait-il
les étudiants à mettre en mots leurs pensées, mais il leur permettait
également de mieux les comprendre et d'aller plus loin dans ces
découvertes. Encore aujourd'hui, le journal est largement utilisé dans
les salles de cours.
D'autres chercheurs allèrent encore plus loin. L'étude du
docteur James Pennebaker permit de donner au journal intime des
dimensions encore insoupçonnées en apportant la preuve scientifique du
pouvoir de guérison non seulement mentale et émotionnelle, mais
également physique, du journal. Les recherches de Pennebaker ont
démontré qu'écrire environ vingt minutes, durant trois ou quatre jours,
sur des événements et des émotions intenses ou difficiles renforçait le
système immunitaire. Le journal n'est pas uniquement utilisé par les
psychologues et les psychothérapeutes, mais également par les médecins
et on admet de plus en plus qu'il peut aider à accéler la guérison des
malades.
Mettre en mots ses pensées, ses rêves et ses peurs permet non
seulement de mieux les comprendre et de les clarifier, mais, avant tout,
d'en prendre conscience! E. M. Forster a dit «Comment saurai-je ce que
je pense avant de lire ce que j'ai écrit?», illustrant ainsi de belle
façon ce que plusieurs diaristes ressentent en écrivant. Ecrire nous
révèle bien souvent à nous-même, permettant à des parties de nous que
nous ignorions de s'exprimer.
C'est pourquoi il est important de
s'écouter lorsque l'on
écrit. Il est aisé de laisser au papier le soin de se charger de nos
problèmes; on écrit comme on sort les poubelles, pour oublier nos
problèmes et s'en libérer l'esprit. Il s'agit certes là d'un avantage
non négligeable du journal, qui nous permet d'apaiser nos tensions, de
nous soulager de notre stress et d'exorciser certains démons. La
relecture est alors pénible et parfois souffrante, nous faisant faire
face à certains reflets de nous qui ne nous plaisent guère.
Mais le journal devient alors un outil puissant de découverte de
soi et de prise d'action; il nous permet non seulement de prendre
conscience des épines qui nous font mal aux pied, mais également d'agir
et de retirer ces épines, une à une. Le journal permet de ne pas
demeurer inactif face à son existence; il est une source de pouvoir
insoupçonnée.
C'est pourquoi certains thérapeutes intègrent le journal à leur
pratique et recommandent à leurs patients de consigner par écrits leurs
rêves, luttes et découvertes. Dans la plupart des cas, la guérison est
plus rapide et les sessions avec le thérapeute plus profitables, étant
donné qu'une partie du travail est déjà faite par le patient lui-même.
Il prend ainsi le temps de se questionner lui-même, de mettre en ordre
ses idées et de les clarifier avant la séance. L'écriture durant le
processus thérapeutique permet également de faire le point de façon
régulière sur le cheminement de guérison, d'en noter les obstacles et
les adjuvants afin de pouvoir les éviter ou en tirer profit. Le patient
peut ainsi prendre conscience d'un modèle de comportement qui,
autrement, lui échappait. En ce sens, le thérapeute peut parfois
suggérer des exercices ou des thèmes d'écriture, afin de dirigier le
patient de façon plus efficace.
Ce type d'écriture peut également être pratiqué lors d'ateliers
du groupe, hors de toute thérapie. Et, surtout, il peut être pratiqué
en solitaire! En revenant sur nos écrits et en se relisant, on remarque
souvent des cycles, des pensées récurrentes, des images qui reviennent
souvent et qui nous échappent dans la vie de tous les jours. Les
problèmes les plus courants nous apparaissent de façon plus claire, plus
consciente lorsque écrits dans notre journal, noir sur blanc. Il est
alors plus facile de changer certaines croyances ou d'éliminer certaines
habitudes de pensées qui nous gâchent la vie! On peut écrire en
conséquence, utiliser des thèmes qui nous aideront à faire le point sur
ces problèmes, adopter des techniques qui varieront les points de vue et
nous permetteront d'y voir plus clair.
Cette approche s'apparente un peu à l'écriture libre mais c'est une
approche beaucoup plus émotive. L'écriture cathartique permet le
déversement libre des sentiments et des émotions -vous savez, ces
moments où l'on a l'impression que notre crayon à une vie bien à lui, où
l'on écrit en étant à peine conscient des mots qui se dessinent sur la
page et où la relecture est plus une surprise et découverte qu'un retour
sur soi... C'est là où on laisse toutes les émotions s'enfuir et
s'exprimer, sans censure, sans scrupules.
Dans mon cas, j'utilise cette technique sans même m'en rendre
compte. D'une phrase à l'autre, je sens que j'écris tout à coup
différemment, que la conscience s'est tue et que c'est un autre aspect
de moi qui parle. Cet aspect trouvera son chemin, s'il a quelque chose à
dire, mais il est parfois bon de le forcer à se manifester. Respirez
un grand coup et puis laissez tout derrière. Ensuite, écrivez et ne
pensez plus à rien.
Pensez à quelqu'un à qui vous n'avez jamais réellement été capable de
parler. Qu'avez-vous besoin de lui dire? Il n'y a aucune limite, et
personne ne vous en tiendra rigueur. Juré, votre journal ne parlera
pas!
Il peut être intéressant d'utiliser le journal pour exprimer à
certaines personnes des choses difficiles à exprimer en face à face.
Certains utiliseront également les lettres non-envoyées pour exprimer
leurs pensées à des gens disparus. Ce peut être une bonne façon de dire
au revoir, de fermer une porte qui refuse d'être tout à fait fermée...
Les lettres sont une bonne façon d'agir, même lorsque la situation nous
rend impuissant; l'écriture est une forme d'action, même si elle ne se
concrétise pas toujours. Les lettres non-envoyées permettent de tout
dire, quite à faire du ménage dans ses pensées par la suite. C'est une
écriture qui permet de se défouler, de tout balancer sans s'inquiéter
des réactions. Elles peuvent également permettre de se clarifier les
idées avant de dire ce qu'on a sur le coeur une bonne fois pour toutes
-un peu comme une répétition générale!
Les lettres non-envoyées sont écrites pour quelqu'un, mais elles
sont à vous. Elles peuvent être détruites par la suite -c'est même
parfois préférable!
Difficile à décrire, cette écriture toute paisible et si apaisante.
C'est en fait plus un état d'esprit qu'une technique -comme c'est
souvent le cas! Il s'agit tout simplement de s'isoler, de se donner du
calme et, surtout, de libérer son esprit. On associe souvent l'écriture
à l'érudition, à la pensée; essayez de faire taire cette partie de
vous. Ne soyez plus rien, videz votre esprit. Et puis écrivez,
question de voir ce qui se passe lorsque la petite voix de la raison se
tait.
Puis, souvent, après avoir tenu un journal pendant une certaine
période, on a parfois envie de le relire, ou simplement de revenir par
écrit sur ce qui s'est passé. La méditation fait alors place à une
forme de réflexion qui tend à faire le point, qui pose des questions,
qui cherche à comprendre. La réflexion rassure, donne un sentiment de
sagesse. C'est un questionnement, une exploration constante. J'écris
souvent de cette façon, personnellement.
L'équilibre, donc; la réflexion cherche à savoir, la méditation
admet qu'elle ne sait pas. Mais ce sont deux états d'esprit qui servent
l'écriture du journal de façon presque magique.
Le dialogue vous permet de voir le monde avec les yeux de quelqu'un
(ou de quelque chose!) d'autre. Il s'agit d'écrire une conversation
dans laquelle vous répondez pour l'autre -ou vous permettez à l'autre de
répondre à travers vous. Tous les points de vue sont alors représentés
et ont voix au chapitre. C'est une technique qui peut paraître très
inconfortable; on tend à n'écrire que ce qui est
vrai, ce qui fut
réellement. Mais pourquoi s'astreindre au réel, qui n'est pas toujours
ce que nos yeux prétendent voir? Jouer le rôle de quelqu'un d'autre
peut parfois s'avérer très éclairant! C'est se forcer à penser
autrement, à se mettre dans la peau d'un autre et c'est également se
permettre d'être
tout ce que nous sommes. Laisser les autres parler à travers vous, permettez-vous d'explorer des perspectives étrangères.
George Sand écrivait un journal dans lequel elle tenait des
conversations avec sa personnalité masculine, par exemple. Il n'y a
vraiment pas de limites aux dialogues que vous pouvez avoir. On peut
retourner dans le passé, discuter avec l'enfant que nous étions, avec un
ami perdu, un parent décédé. De tels retours en arrière peuvent
permettre d'exorciser des événements passés, ou d'éclairer des
situations laissées ambigues. On peut également se permettre de régler
des comptes, tout en laissant les autres répondre, ne serait-ce que
virtuellement. Et pourquoi ne pas se projeter dans l'avenir et
questionner ce que l'on deviendra? On peut dialoguer avec des objets,
même! Que rien ne vous arrête.
- The Center for Journal Therapy
- Il s'agit ici d'un organisme mis sur pied par Kathleen Adams,
"the diary queen". Si vous ne croyez toujours pas aux vertus du journal
comme guérisseur, ce site s'emploiera à vous convaincre de ses
bienfaits. Les Américains semblent raffoler des ateliers de journaux
intimes de ce genre. Un site intéressant, sur une vague qui n'a pas
encore déferlé au Québec.
- National Association for Poetry Therapy
- Poetry therapy
Et vous? De quelle manière votre journal vous fait-il du bien?
Pensées préliminaires
Un journal est une longue lettre
que l'auteur s'écrit à lui-même, et le plus étonnant
est qu'il se donne à lui-même de ses propres nouvelles.
Julien Green
Comment définir le journal? Ca semble pourtant facile... Les
raisons et les
contenus
varient tellement que c'est presque désespérant de vous donner une idée
complète de ce qui se peut s'y retrouver. Et c'est sans compter les
différents visages que le journal a porté
au fil du temps!
Pour savoir de quoi on parle
D'abord, un journal, ça s'écrit au fil du temps; c'est très différent
de toutes les autobiographies, mémoires, et autres proches parents du
genre. Le mot le dit; le journal est tenu au jour le jour, plus ou
moins scrupuleusement, mais il est toujours une espèce de représentation
«en direct» de la vie. Pour ceux que ça intéresse, on appelle
quelqu'un qui écrit son journal un «diariste» (oui, je sais, ça
ressemble à... Mais bon...) Certains, peut-être pour éluder cette
ressemblance, utilisent plutôt le terme «intimistes». À vous de
choisir...
Ces derniers temps, avec l'apparition des journaux en-ligne,
entre autres, on revient sur les mots. Le terme «journal» gagne
généralement l'accord de tous mais il en va tout autrement pour le
vocable «intime» qui est loin de faire l'unanimité. On lui reproche
d'isoler, de contraindre, de limiter l'écriture. Certains lui préfèrent
personnel, d'autres choisissent le terme «chronique» ou «billet»
personnel. Quelques-uns manifestent bien certains
préjugés à l'égard du, qu'on l'appelle
diary, chronique personnelle ou journal intime. Je suis une diariste convaincue mais quand même objective: je vous laisse en juger!
Ces débats terminologiques ne sont pas que l'apanage du monde
francophone, peu s'en faut. Les anglophones ont aussi leurs querelles
de mots. Plusieurs diaristes écrivant dans la langue de Shakespeare se
défendent bien de tenir un «diary»; le terme a quelque chose d'enfantin,
de puéril. On lui préfère souvent le terme plus neutre de «journal».
Et ne vous faites pas d'illusions! Il y a bel et bien une différence.
«Diary» renverrait au simple enregistrement des jours, à la consignation
pure d'événements et d'anecdotes. Le «journal», lui, va plus loin et
englobe une dimension d'analyse et d'introspection que le «diary» n'a
pas. Etymologiquement, on aurait pu croire le contraire, mais bon...
Les termes peuvent également varier avec le contenu. On parlera de
journal de voyage, de journal spirituel, de journal de gratitude.
Certains diaristes tiennent jusqu'à quatre ou cinq journaux intimes à la
fois parce que chaque journal a sa thématique propre. L'un d'eux peut
être entièrement consacré à leur vie amoureuse, un autre aux rêves
qu'ils font durant la nuit, un autre leur sert à raconter leur petit
quotidien... Le style employé peut être très différent d'une personne à
l'autre, être littéraire chez l'un, très prosaïque chez l'autre.
Encore une fois -le répéterai-je jamais assez?- les possibilités sont
infinies...
Il est évident que le contenu de certains journaux intimes est
banal à faire peur; le journal demeure toujours le reflet de celui qui
l'entretient et le quotidien a lui aussi sa place dans le journal,
malgré l'intérêt limité qu'il suscite. Je considère quant à moi que la
banalité de mon journal a l'avantage de ne pas me gêner en plus
d'ennuyer profondément les éventuels curieux qui pourraient être tentés
de jeter un coup d'oeil sur mes pages privées... Enfin, certains auront
besoin d'un petit coup de pouce pour déjouer les terribles pannes
d'inspiration qui gettent chacun d'entre nous. Des ateliers d'écriture
sur le journal intime peuvent proposer quelques remèdes, mais vous
pouvez aussi quelques
trucs éprouvés par ceux qui vous ont précédé.
On raconte que les premiers journaux intimes, du moins ceux qui
ressemblent le plus au journal tel qu'on le connaît aujourd'hui,
remontent au dixième siècle et nous viennent du Japon. A l'époque, les
courtisanes japonaises consignaient dans des petits carnets qu'elles
conservaient sous leurs oreilles, d'où le terme «pillow books» -oui,
oui, comme dans le film! Ces carnets allaient déjà plus loin que le
simple enregistrement d'événements; les premières diaristes ajoutaient
parfois des bribes de fiction au journal, des rêveries, des émotions...
Les débuts du journal en Occident furent beaucoup moins marqués
de fantaisie. Les premiers journaux européens tiennent davantage du
livre de bord, à la fois registre de naissances, de mariages et de de
décès et livre de comptes. Les propriétaires de domaines y
enregistraient les ventes et les achats, les informations reliées à la
gestion de leurs terres et à la vie de leur famille. Ces premiers
journaux, qu'on appelle également «livres de raison», étaient bien
éloignés des «pillow books» japonais et n'avait pas grand'chose
d'intime...
Rapidement, le journal a été récupéré par les congrégrations
religieuses. Plusieurs traditions protestantes ont intégré le journal à
la vie spirituelle de leurs fidèles, qui y inscrivaient leurs prières,
actes de dévotion et, bien sûr, péchés! On dit que le journal a été
amené en Amérique par les puritains du Mayflower. Les pasteurs
enseignaient l'usage du journal aux jeunes enfants, entre autres, en
faisant à la fois un outil d'éducation religieuse et d'apprentissage de
la langue.
On raconte également que parmi les premiers journaux intimes
figurent les journaux de sorcières, dans lesquels ces dernières
consignaient recettes et potions en plus d'y inscrire les sorts qu'elles
jetaient aux passants et aux villageois. La chose est plus crédible
étant donné qu'au Moyen-âge, la plupart de celles qui passaient pour des
sorcières étaient des paysannes qui ne savaient probablement pas écrire
mais, tout de même, l'idée a quelque charme...
Si on ajoute à l'histoire du journal ce petit épisode de
sorcellerie, c'est peut-être qu'il a longtemps été le seul genre
littéraire auquel pouvaient se prêter les femmes. Mise à part la
correspondance, le journal était bien souvent le seul acte d'écriture
auquel pouvait prétendre la femme puisque la haute littérature était
réservé, en priorité aux hommes. Plusieurs journaux intimes d'époque
nous permettent de jeter un regard inédit sur la vie des femmes des
temps passés.
Il fut également, et demeure, amplement utilisé par les
écrivains, artistes, philosophes et penseurs de tout acabit comme
tremplin à la créativité, réservoir d'idées et source d'inspiration. On
lit encore aujourd'hui les journaux de Kafka, Anaïs Nin, Carl Jung,
Julien Green, Hubert Aquin...
En somme, le journal a bien changé au fil des ans. Il est
maintenant publié, lu et relu, tenu par une variété grandissante de
diaristes d'un peu partout. On lui reconnaît des vertus thérapeutiques,
on l'étudie dans les cours de littérature, les professeurs l'utilisent
comme outil pédagogique et les internautes s'en donnent à coeur joie
dans leur journaux en-ligne. Les genres littéraires qui peuvent
prétendre à des telles modifications au cours des âges et à une telle
versatilité sont rares!
Peu importe votre but, peu importent vos plans, ça aide toujours de
savoir ce que l'on attend de notre journal. Il peut revêtir tellement
de formes... À vous de savoir lesquelles seront les vôtres!
Quelques pensées sur ses multiples visages...
- Pour se rappeler
- Personnellement, ce qui m'anime est une mentalité que je
qualifierais d'«archiviste» et de collectionneuse. Depuis que je suis
enfant, je ne peux me résoudre à jeter quoi que ce soit. Je garde tout!
Tenir un journal, c'est une façon de collectionner les jours... Bien
sûr, les ambitions du journal sont en quelque sorte une cause perdue
d'avance. Même si la plupart des diaristes ont le désir de tout
conserver, il est bien évident que c'est impossible. De là à aller
jusqu'à dire que le journal est d'avance un échec, il n'y a qu'un pas...
que certains ont d'ailleurs franchi. Bien sûr, le journal intime a des
limites. Ceux qui tiennent leur journal en sont conscients... et
tristes, souvent.
- Pour se comprendre
- Se mettre sur le papier quotidiennement, c'est aussi une façon
de se mettre à nu et de se déchiffrer l'intérieur, sans avoir à se payer
une thérapie. Notons au passage que plusieurs l'utilisent à des fins thérapeutiques,
d'ailleurs, pour accompagner une psychothérapie par exemple ou lors
d'une convalescence. On passe sa vie à se chercher, à se découvrir. Le
journal agit ainsi comme le témoin de cette quête de soi, et même comme
partenaire, car étant seuls face à nous-mêmes dans notre journal, nous
ne pouvons souvent pas faire autrement que de voir et de comprendre ce
que nous sommes en relisant ce que nous avons écrit. Certains relisent
même leur journal et se surprennent eux-mêmes de ce qu'ils y lisent.
Certains ne comprennent pas davantage... En tenant le journal de nos
jours, c'est soi, c'est la vie que l'on interroge. Sans obtenir de
réponses, souvent...
- Pour se construire
- Un journal, c'est une mise en scène de soi. Nous sommes le
personnage principal de notre journal. Nous avons parfois tendance à
écrire les choses non telles qu'elles sont, mais telles qu'elles
devraient l'être. On écrit pour embellir ou dramatiser sa vie, pour lui
donner une saveur nouvelle. Le journal est bien souvent l'un des
derniers refuges du rêve. Comme la vie, «c'est une foule de choses, et
pas toutes en même temps», certains ont en plus l'ambition de se
re-construire par le biais de leur journal, de se reconstituer en une
unité, et non l'identité fragmentée qu'ils ont conscience d'être dans
leur vie de tous les jours. Par l'écriture de leur vie, ils luttent
contre l'éparpillement de cette existence qu'ils sentent souvent.
- Pour se raconter
- Parce que certains trouvent un ami et un confident en leur
journal intime. Pratique pour des confessions qui doivent rester
secrètes et pour se vider le coeur de nos péchés pas racontables...
Certains ont un journal à défaut d'un ami et vont même jusqu'à
l'abandonner une fois le besoin d'un confident humain comblé.
- Pour se découvrir
- A travers le journal se constitue un espèce de phénomène
d'incubation, dont la citation de Julien Green au haut de la page
exprime bien la nature. On ne sait pas toujours ce qui se passe, ce que
nous sommes, ce que nous vivons, avant même de l'écrire sur le papier.
On se relit et on s'étonne; a-t-on vraiment écrit ça? C'est
vraiment ce que nous pensons...? L'écriture permet parfois à certaines
pensées de surgir au grand jour, presque par surprise. On permet
certains écarts à notre plume et certaines choses apparaissent tout
simplement avec plus de clarté si l'on se laisse le temps d'y réfléchir
et de les mettre en mots.
Mentionnons au passage que, lorsqu'on les questionne sur l'origine de
leur journal intime, certains diaristes citent des raisons beaucoup
plus pragmatiques et invoquent comme justification au début de leur
journal le fait d'avoir reçu en cadeau un beau cahier... Comme moi,
quoi! D'autres le font pour des raisons tout à fait ponctuelles, comme
par exemple, pour accompagner une thérapie, ou par besoin de se confier
suite à une situation difficile, comme un décès par exemple. D'autres,
enfin, le font pour le simple plaisir d'écrire, de produire, car le
journal intime demeure avant tout un acte de création. Il est une
oeuvre universelle, voire intemporelle, qui échappe à toutes les modes
et à toutes les tendances. De tous temps, les gens ont consigné par
écrit les moments de leur vie. C'est en quelque sorte un réflexe
naturel, celui de la lutte contre l'oubli, contre le vide, contre le
temps qui passe et qui risque de nous voir réduits à néant, détruits par
ce qui viendra après nous.
Un journal, c'est...
- ...un endroit pour rêver
- Facile d'oublier le quotidien et ce qui n'y va pas en rêvant et
en créant, par l'imagination des vies choisies. Allez-y, personne ne
saura jamais ce que vous aurez écrit! Tout ça, ce n'est que pour vous.
- ...un lien avec la nature
- On y enregistre nos impressions et nos observations de la
forêt, de la mer, des saisons, des étoiles... Bien des enfants
commencent de cette façon, et prennent la liberté de coller des feuilles
d'automne, des dessins de cristaux de neige...
- ...un endroit pour se défouler
- Toutes les insultes que vous ne pouvez balancer à votre
entourage, écrivez-les ici! Votre journal ne s'en formalisera pas. On
dira ce qu'on voudra, mais c'est si vrai que ça soulage... L'exercice
des lettres non envoyées est toujours libérateur.
- ...un récit de voyage
- On peut y ajouter des cartes postales, des tickets de train...
On y décrit notre itinéraire, nos impressions, tout ce dont on veut se
rappeler et ce que l'on vit sur le moment. Pour éterniser le voyage,
qui ne dure jamais assez longtemps!
- ...une expression de gratitude
- Plusieurs se servent du journal pour tenter de voir les aspects
privilégiés, positifs et souvent négligés, de leur vie. Prenez le
temps, chaque jour, de noter une chose que vous appréciez de votre vie.
Les petits détails ont souvent leur importance. C'est une forme de
journal qui est très fréquemment utilisé et un exercice toujours
revigorant.
- ...une halte
- Le journal peut être un lieu de repos, un sanctuaire de calme,
une petite chambre privée dans un hôtel très tranquille... Dès qu'on y
écrit la première ligne, on se sent chez soi, on se sent soi. On
peut voir le journal comme un lieu privilégié, un hâvre de paix.
Prenez le temps d'écrire le moment, décrivez ce que vous voyez autour de
vous, attardez-vous au rythme de votre souffle, aux sons familiers de
la maison, au glissement du crayon sur le papier. Parfois, quelques
minutes suffisent. Les choses deviennent souvent plus claires,
lorsqu'on leur donne le temps d'être sans les brusquer.
- ...un catalyseur
- Un journal clarifie nos buts. Voir les choses par écrit aide à
mieux les comprendre, à les situer dans leur perspective. Il aide à se
concentrer sur l'essentiel et à oublier les petits tracas et les
contingences du quotidien. En exprimant nos sentiments par rapport aux
autres, par exemple, on comprend bien mieux vos relations avec notre
entourage, ce qui aidera à mieux les vivre. En nous forçant à mettre
nos émotions et nos pensées en mots, il donne prise sur les choses et
aide à se sentir en contrôle.
- ...une machine à explorer le temps
- On y enregistre les jours comme un film que l'on peut voir et
revoir. Ajoutez-y de vieilles photos, des bouts de tissu de votre robe
favorite alors que vous étiez enfant... Il est parfois aussi plaisant
de relire ce que nous avions écrit sur le moment que d'y revenir avec le
temps et de raconter les événements avec dix, vingt, trente ans
d'éloignement. Et parfois, raconter un événement douloureux et se
permettre de le revivre dans le journal permet de se faire du bien. On
corrige, par l'imagination, une erreur de jeunesse, on réécrit le passé.
On peut aussi se projeter dans le temps, imaginer ce qui se passerait
si seulement... Ce qui se serait passé si...
- ...un lien avec la réalité
- Écrire un journal affirme la réalité de votre vie. Écrire
parvient à donner du sens à des choses qui semblent insignifiantes dans
la vie de tous les jours. Se relire soi-même amène parfois à des
découvertes surprenantes, voire douloureuses.
- ...une détente
- C'est au fond une forme de méditation, un dialogue intérieur
qui nous remet en contact avec notre rythme personnel. C'est encore
plus vrai lorsqu'on écrit à la main; le rythme de notre propre écriture
finit par nous bercer...
- ...un plaisir
- C'est un plaisir d'entendre sa propre voix, de se sentir vivant
sur le papier et de sentir ses mots et ses idées prendre forme. C'est
un plaisir de sentir sa plume glisser doucement sur le papier, au rythme
de ses pensées. C'est même un plaisir de voir, de toucher les pages
remplies de notre écriture, qui s'empilent au fil des ans.
Vous l'aurez compris, l'essentiel n'est pas ici d'écrire mais bien de
réflechir sur ce que l'on a à écrire. Écrire pour le simple plaisir
d'écrire, et non pour celui d'avoir écrit, c'est ce qui fait toute la
différence. Attardez-vous donc à ce processus, à votre main qui court
sur le papier, aux mots qui vous viennent à l'esprit, à toutes les idées
que vous ressentez le besoin d'écrire. Et pour ces soirées où
décidément, rien ne va, prenez le temps de comprendre pourquoi. Cela
vous fera éventuellement un joli sujet de réflexion pour votre journal
le lendemain soir...
Et puis, avec le temps, le journal semble se passer de raisons.
Il semble exister pour et par lui-même, et on oublie ce qui le fait
naître et renaître sans cesse. On ne peut pas toujours tout
justifier...
Les diaristes délinquants
A man who keeps a diary pays,
Due toll to many tedious days;
But life becomes eventful—then,
His busy hand forgets the pen.
Most books, indeed, are records less
Of fulness than of emptiness.
William Allingham
On le voudrait sincère, complet, noble et passionant à lire.
Pourtant, les jours passent, on se relit et on n'est pas très fier de
soi... Les diaristes ont de grands projets pour leurs journaux et
souffrent vite de complexes: on n'écrit pas assez souvent, on tait ses
erreurs de parcours, on embellit la vérité. Quand ce n'est pas la censure, ce sont nos longs silences qui nous embêtent... Que d'embûches sur le chemin du journal parfait!
Portrait de nos petites délinquences, question de faire sauter les complexes de culpabilité...
C'est tricher! Mais bon, comme je ne cesse de vous répéter que le
journal intime ne connaît pas de règles... Si ça vous chante de raturer
des passages particulièrement torrides ou d'arracher des pages un peu
trop assassines, allez-y sans gêne. Certains diaristes utilisent des
langages codés afin d'être certains de ne pas se faire comprendre... au
risque de ne plus se comprendre eux-mêmes quelques années plus tard.
D'autres détruisent carrément leur journal au grand complet, comme si le
fait de le brûler ou de le déchirer anéantissait non seulement son
contenu mais également les tourments qui l'ont fait naître.
Bien souvent, l'essentiel est l'acte d'écrire; une fois que c'est
fait, ce qui arrive à leurs oeuvres importe peu à certains. Et puis,
l'auto-censure, même inconsciente, est présente dans chaque geste que
l'on pose. On s'interdira toujours de parler de quelque souvenir
désagréable, ou d'un sujet difficile à aborder. D'après certains, c'est
là que le journal commence vraiment à être profitable; chaque fois que
l'on se dit "Non, je refuse de parler de ça" ou "Je ne peux pas croire
que j'ai vraiment écrit cela!", c'est à ce moment que nous avançons
vraiment. C'est une théorie. Et peut-être que nos tabous finiront un
jour par ne plus l'être. Mais il y aura toujours des sujets difficiles à
aborder et sur ces sujets, nos silences en disent autant que nos
paroles. Ce qui m'amène à...
Certains abandonnent leur journal durant des périodes plus ou moins
prolongées, y revenant lorsque l'envie leur en prend. Des périodes
moins intenses, ou au contraire trop difficiles, les découragent parfois
de consigner leur existence par écrit. D'autres tiennent leur journal
scrupuleusement, se sentant même coupables de ne pas être aussi
rigoureux qu'ils le souhaiteraient. Il est important en tous les cas de
se rappeller que le journal est un moyen et non une fin en
soi. Négligez-le, s'il le faut. Il est bon d'écrire, mais uniquement
si le besoin s'en fait sentir. Votre journal ne doit pas être une
corvée.
Et puis, comme l'a souligné Allingham dans la citation en
exergue, les silences eux-mêmes parlent... Les jours manqués, dans le
journal, pèsent parfois bien lourd au diariste consciencieux qui
voudrait tout noter, tout écrire, tout garder. Les journaux intimes de
notre enfance, ceux qui avaient une page par date, nous ont bien donné
l'impression qu'il fallait écrire chaque jour. Et pourtant, les
journées les plus occupées, celles qui nous laissent moins de temps pour
écrire, sont souvent celles dont nous voudrions garder le souvenir.
Qu'à cela ne tienne? A ces jours manqués, collez une photo, un
billet de spectacle, un pétale de rose? Les souvenirs ne se gardent pas
toujours avec des mots!
Bien sûr, il faut aussi souligner que négliger son journal par
manque de temps... ou par paresse, c'est bien normal. Tenir un journal
est une activité qui demande beaucoup d'engagement et d'implication
personnelle. Néanmoins, il faut parfois savoir se donner des priorités.
Si vous voulez vraiment vous y mettre, je ne m'en fais pas pour vous;
vous saurez bien trouver le temps. Alors, votre principal problème ne
sera plus de vous décider à écrire, mais plutôt de vous résigner à
arrêter! Car le journal peut demander beaucoup, et même rendre certains
conjoints «jaloux». Les autres s'étonneront toujours de vous voir
penché avec cette belle ferveur sur votre journal. Ne vous en faites
pas. Ceux qui, comme vous, ont le stylo facile, comprennent...
Question d'être précis, soulignons que ceux-là constituent environ 6% de
la population québécoise. Les diaristes sont toujours une denrée rare,
mais leur nombre va croissant.
Disons-le tout de suite, ça n'existe pas. Quand on ouvre un cahier
vierge, on le voit déjà rempli de doux secrets, de sages révélations, de
vérités existentielles. Pourtant, un journal n'est pas un roman -il
n'est pas une oeuvre qui doit satisfaire à un quelconque standard. Et
puis, tout romancier vous dira que peu importe à quel point le roman est
réussi, il n'arrive pas à la cheville de celui qu'il avait en tête au
départ.
Pour le journal, c'est pareil. Il y aura peut-être (sûrement)
des jours où vous vous relirez et ne pourrez en croire vos yeux.
Certaines entrées seront peut-être ennuyeuses, bourrées de fautes
d'orthographe, maladroites. On voudrait écrire quelque chose et
pourtant les mots ne viennent pas. On a cette idée géniale, de souvenir
merveilleux et pourtant nous voilà incapable de l'exprimer. Pire: on
n'a peut-être rien à dire. Notre journée se résume peut-être à une
liste d'épicerie et un aller-retour au boulot! Horreur! C'est la faute
au journal. Ou alors c'est ma faute à moi; je suis un diariste raté et
puis qu'est-ce qui m'a pris de vouloir raconter ma vie?
Patience. Indulgence. Rappelez-vous ce qui vous a donné l'envie
d'écrire au départ. Aviez-vous en tête ce journal parfait? Ou bien ne
souhaitiez-vous qu'écrire, seulement écrire? Certes, il faut savoir à
quoi vous vous attendez de votre journal mais également garder en tête
qu'il n'est pas une fin en soi. Le résultat importe peu, c'est ce que
vous retirez de votre journal pendant que vous écrivez qui compte.
Le journal parfait, c'est celui qui vous donne du plaisir et de
l'abandon pendant que vous y êtes plongés, peu importe les ratures, les
trous de mémoire, les hésitations et les quelques pages ennuyeuses à
relire. Ce journal c'est vous, avec toutes vos imperfections et vos
petits défauts.
Le journal aux yeux des autres
I do not keep a diary. Never have.
To write a diary every day is like returning to one's own vomit.
J. Enoch Powell
Je n'ai pas pu résister à l'envie d'insérer ici cette citation (un
peu dégoûtante, il faut l'avouer) car je la trouve représentative d'un
certain type de préjugés face au journal. On pense que les diaristes
sont nombrilistes, névrosés, passéistes. On leur attribue toutes sortes
de petites manies un peu inquiétantes... Moi, je ne peux pas
m'empêcher de faire sortir les diaristes de leur petit monde...
Ecrire est un acte bien solitaire, qui confine au secret,
certes. Mais croire que le journal isole nécessairement le diariste de
tout son monde est un non-sens; on écrit aux yeux des autres et si on
cache le journal c'est là un geste volontaire et réflechi qui dépend
d'une foule de facteurs. Le journal est soumis au regard des autres au même titre que le diariste lui-même.
Or donc, comment le journal est-il perçu? Le diariste est-il un ermite en puissance? Quelques mots sur des préjugés qui ont la vie dure.
Plusieurs ont tendance à croire que les diaristes sont des gens
profondément asociaux, entièrement tournés vers eux-mêmes et coupés de
la réalité. Ils leur prêtent volontiers une personnalité contemplative,
un peu rêveuse, narcissique et profondément passive. Selon ses
détracteurs, le journal intime pousse à une vie solitaire et peu
productive; ils vont même jusqu'à dire que tenir un journal intime est
un moyen de compenser une existence peu satisfaisante et parsemée
d'échecs. Enfin, les «anti-journal» prétendent que les diaristes
perdent leur vie à l'écrire, plutôt qu'à la vivre.
À cela, que répondre? Je voulais simplement vous faire réfléchir
à ces arguments car ils sont intéressants en soi, et plusieurs
diaristes se sont même trouvés d'accord avec certains d'entre eux. En
ce qui me concerne, je crois que revenir sur soi, sur les événements qui
nous font, donne une grandeur toute nouvelle aux choses. J'irais même
jusqu'à dire qu'une journée dont on a perdu la trace et le souvenir est
une journée perdue... Mais cela est une opinion toute personnelle.
Pensez-en ce que vous voudrez.
J'ai tendance à traîner mon journal avec moi partout, tout le temps.
J'écris dans les salles de classe, les cafés, j'écris dans le salon
familial au su et au vu de tous, j'écris en plein air, dans les parcs,
près des piscines, partout. Mon journal n'est pas un secret; même si je
voulais en cacher l'existence, je ne le pourrais pas, car il fait trop
partie de moi. Aussi, j'ai eu droit à toutes sortes de regards sur mon
journal.
Plusieurs sont surpris. On me dit: «Tu écris quoi,
ton journal?» et lorsque je réponds, soudainement, on se tait. Comme si
on s'était attendu à ce que je m'exclame que non, bien sûr, je le
faisais adolescente mais plus maintenant. Le journal n'est apparemment
pas un genre «adulte». On est pas sûr de comprendre, on préfère hausser
les épaules et changer de sujet.
Les habitués me regardent souvent écrire pendant un moment, sans
rien dire. Au bout de quelque temps, ils s'impatientent: «Mais de quoi
tu parles, à la fin?» Le diariste, pour écrire tellement, doit
forcément avoir un problème. On n'écrit pas tout ça si tout va bien, le
bonheur n'a pas besoin de mots! Et puis si ça va si mal, alors
pourquoi il n'en parle pas? C'est tellement mieux de s'exprimer à haute
voix, et moins ennuyant de parler aux autres qu'à soi-même.
Décidément, ça les intrigue. Ils jettent un oeil vers le cahier
jalousement caché, demandent «Lis-moi un bout, rien qu'un petit bout...»
Devant le refus du diariste, ils sont convaincus que quelque secret
pas racontable est dévoilé dans ces pages; le diariste est décidément
une bien curieuse créature.
De temps en temps, on me demande comment je fais. Plusieurs me
disent vouloir écrire de la sorte mais ne pas trouver le moyen; on
manque de temps, d'inspiration. Opportuniste, je les renvoie à mon
site!
Si certains diaristes font face aux réactions les plus diverses de la
part de leur entourage, d'autres ne révèlent même pas l'existence de
leur journal. C'est une façon de se protéger, parce que certains
diaristes se sentent vulnérables. Tous ces mots peuvent devenir autant
de petits crimes commis à l'endroit des autres; il est si facile
d'interpréter tout de travers ou de s'emporter devant une phrase qu'on
ne pensait pas, qu'on a écrite pour se défouler. Le journal est écrit
pour soi, pas pour les autres; un oeil étranger et non invité risque
bien d'y trouver quelque chose qui lui déplaît et qu'il n'était pas
sensé lire. Respecter l'intimité du diariste,
c'est également se respecter soi-même et s'éviter des blessures
inutiles. C'est donc pourquoi plusieurs taisent son existence.
Les journaux que l'on conserve
What is a diary as a rule? A document useful to the person who keeps it,
dull to the contempory who reads it, invaluable to the student,
centuries afterwards, who treasures it!
Ellen Terry
Mais après?
La grande question... Que deviendra mon journal? Le relira-t-on vraiment?
Je peux personellement vous dire que je le relis rarement, car il
m'est nécessaire d'avoir du recul afin d'apprécier mon vécu. Lorsque
mes journaux auront amassé suffisament de poussière, que les pages en
auront jauni et que je ne me souviendrai plus de ce qui y est consigné,
j'y reviendrai probablement avec plaisir. Mais pour l'instant il est
relativement peu intéressant de me rapeler ce que j'ai fait l'année
dernière.
Je me demande évidemment ce qu'ils deviendront lorsque je n'y
serai plus. À ce jour,
les bibliothèques ne se proposent pas encore de conserver les journaux
de tous et chacun pour des raisons pratiques évidentes. En attendant,
certains envisagent de détruire leur journal, d'autres de le léguer à un
ami, un parent. Certains espèrent même le léguer aux archives
nationales... Pourquoi pas? Si ce n'est pas tous les journaux intimes
qui méritent d'être publiés, je crois fermement que tous méritent
néanmoins d'être précieusement conservés. En Europe, on retrouve déjà
quelques centres d'archives autobiographiques qui permettent aux diaristes de tout acabit de déposer le précieux résultat de leurs longues années d'écriture.
L'idée de voir tous mes cahiers amassés amoureusement au fil des
années, compagnons de route extraordinaires, perdus à jamais sans que
personne, à son tour, ne les entretienne comme je l'ai fait, me brise le
coeur. On peut toujours les laisser à sa descendance, si on en a une,
mais bien souvent les journaux intimes des aïeux ne lui apparaissent pas
très inspirants et lui parlent peu.
Fait intéressant, je me rends compte que bien des diaristes ne
pensent pas vraiment à la question, ou ne s'en soucient carrément pas.
Peut-être que je questionne des diaristes trop jeunes; à vingt ans, on
ne pense pas à ce genre de choses. Et puis, le léguer semble être une
solution valable et tout à fait raisonnable. Moi, je me pose
probablement trop de questions. Et si les légataires s'en fichaient
bien de mon journal? S'ils le lisent et s'en moquent, le laissent dans
le grenier à la merci des souris et de la moisissure? S'ils l'oublient
et le laissent dormir sans que jamais, jamais personne ne l'ouvre à
nouveau?
Non, décidément, je ne voudrais pas de ce sort pour mon pauvre journal.
Et puis, une fois légué, la question du journal n'est pas tout à
fait réglée. Qu'arrivera-t-il lorsque mes légataires mourront à leur
tour? A qui le laisseront-ils? En supposant qu'ils trouvent quelqu'un
susceptible d'être intéressé par mon journal, ce sera selon toute
vraisemblance quelqu'un que je ne connaîtrai pas. Je lui serai
probablement indifférente, une grande tante dont il a vu des photos sans
s'émouvoir outre mesure. Comment croire qu'il tiendra suffisamment à
mon journal pour lui assurer l'avenir qu'il mérite?
Parce qu'un journal a de toute évidence un avenir. Le dernier
souffle de son auteur, s'il signifie la fin d'une vie, ne signifie pas
que le journal est mort. Le journal, selon moi, continue de vivre parce
qu'il est toujours porteur de cette vie. C'est là que réside
toute sa beauté et toute sa noblesse. Il deviendra peut-être le trésor
d'une famille attristée, ou même celui qui ne connaissait pas son
auteur, mais qui se reconnaît dans ses lignes, ses mots et ses pages.
Il trouvera peut-être asile sur les tablettes d'une bibliothèque ou d'un
centre d'archives, là où les gens feront de lui un témoin, une fenêtre
ouverte sur une époque révolue...
Mais après? La question continue donc de m'angoisser...
Le journal et ses formes
In Hollywood now when people die they don’t say, «Did he leave a will?»
but «Did he leave a diary?»
Liza Minnelli
Traditionnellement, le journal prend deux formes ; il est écrit, et
il est écrit sur du papier. A quel point ces limites ne tiennent plus
aujourd'hui! Non seulement les journaux ordinolingues, et plus
spécialiement web, ont remis en question ces définitions dépassées, mais
de plus en plus de diaristes se sentent aussi devenir artistes et
s'évadent du petit monde du papier. Que ce soit par le biais des arts visuels ou des multiples objets qui peuvent devenir journal, un regard sur les multiples possibles formes du journal intime.
Le journal intime réinventé
En 1987, la Memorial University Art Gallery organisait une exposition baptisée The Diary Exhibition.
On y présentait seize oeuvres en forme de journaux intimes, créées par
seize artistes contemporains canadiens. Les formes que le journal à
cette occasion! Que de nouvelles explorations!
On a, par exemple, exploré le thème du journal photo ; une
artiste, Sandra Semchuk, a pris des photos d'elle chaque jour, sans
exception, sans tricherie, sans maquillage. Question de se faire face,
de regarder dans les yeux cette identité qui est sensée être la sienne
et qui doit sans cesse être redécouverte. Une myriade de portraits qui
livrent à eux seuls toute un éventail de réalités aussi différentes les
unes des autres - non seulement par le mouvement du quotidien, mais
également dans les mouvements de l'âme. Une rencontre avec soi.
Un autre artiste, Michael Mitchell, a également exploré le thème
du quotidien à l'aide de photographies ; rentrant chez lui tard le soir,
il découvrait les vestiges du jour laissés à eux-mêmes par ses enfants
et par sa femme. Autant de rencontres improbables entre des objets
hétéroclites, comme des installations imprévues qui demandent à leur
spectateur de recréer leur sens. La journée de sa famille se livrait à
lui et comme un espion, à l'aide de ses photos, il se chargeait de
reconstruire sa propre absence à l'aide des indices ainsi amassés, comme
son propre quotidien exploré à travers celui des autres.
Marcel Gosselin s'est également penché sur le quotidien de sa
famille... à travers les coeurs de pommes! Pour chaque pomme mangée, il
se faisait ainsi un devoir de noter sa petite histoire et le contexte
qui l'accompagnait ; qui a mangé cette pomme? à quel moment? quelle
histoire l'entoure? Chaque coeur de pomme s'est ainsi retrouvé comme
une pièce d'une mosaïque, reconstruisant le quotidien par le biais
d'objets qu'on aurait autrement écartés ; le journal est ce qui reste de
la vie une fois qu'on a vécue. Nos mots sont autant de résidus de
l'expérience et du vécu.
C'est également ce que Sandra Tivy a compris dans son oeuvre Four months of consuming.
Voulant vérifier par exemple l'impact de ce qu'on appelle la société
de consommation, l'artiste a conservé chaque étiquette de chaque produit
consommé durant quatre mois, construisant ainsi chaque jour un immense
collage de tout ce qui lui passait entre les doigts. Un portrait
captivant, mais aussi un peu effrayant, d'un quotidien qui nous échappe
souvent...
Mais le projet le plus captivant est probablement celui de
Geoffrey Wannacott, qui a non seulement poussé les limites de
l'enregistrement des faits quotidiens, mais également les siennes.
Pendant un mois, il s'est volontairement confiné dans une minuscule
pièce, n'ayant à portée de la main que sa nourriture, les objets
nécessaires à son hygiène la plus élémentaire et ce qui lui fallait pour
écrire un journal, celui-ci se retrouvant souvent immortalisé sous la
forme de photographies, de textes écrits sur le murs ou tout simplement
de pages manuscrites. Le journal est alors présenté non seulement comme
le compte-rendu du quotidien, mais comme le résidu du processus
créateur, et comme un prétexte à l'exploration de ses limites. Et
quelle exploration...
Les objets-journaux
Plus simplement, vous êtes probablement entourés d'objets-journaux
sans le savoir. Tout ce qui contient ne serait-ce que la marque d'une
émotion, d'une pensée, d'une impression consignée de votre main
constitue une expérience intimiste importante. Toute reconstruction du
quotidien, tout écrit personnel peut également devenir journal sans même
qu'on s'en rende compte. J'ai chez moi des années de correspondance
conservée sans jamais être communiquée aux principaux intéressés, une
pile d'albums-photos, dont certaines ont été annotés à l'arrière, des
citations favorites écrites au fil des jours dans des agendas, des mots,
par-ci par là sur un calendrier, des bouteilles, des billets, des
rubans qui me rappellent des journées chéries. Un journal intime?
J'aime à le croire.
Une diariste a un jour remarqué que derrière les fiches sur
lesquelles elle inscrivait ses recettes, elle avait également pris
l'habitude, sans même que le geste n'ait été réfléchi, de noter ses
souvenirs, impressions et commentaires par rapport à chaque plat. Dans
quelles circonstances elle l'avait goûté la première fois, quelles
avaient été ses impressions... Un journal intime? Pourquoi pas?
Le journal intime peut prendre tant de formes, à l'image de notre
propre personnalité, pourquoi ne pas le laisser se métamorphoser et
donner place à l'imagination?
Lu sur le web
Man has to be willing to show himself.
Sidney Jourard
Le nombre des journaux disponibles en ligne croît à un rythme
exponentiel chaque mois, les listes et les webrings se succèdent, les
listes de discussions reliées au sujet sont plus nombreuses et plus
vivantes que jamais. Les diaristes web forment maintenant une petite
communauté très dynamique dont le nombre d'initiatives va croissant.
Sacrilège? Exhibitionnisme? La mode du vécu, descendante des reality shows
américains, des biographies à scandales...? Peut-être s'agit-il là de
la même envie, d'un côté de devenir une célébrité à peu de frais, de
l'autre, d'un peu de sensationnalisme réaliste. Peut-être s'agit-il
également d'une envie de partager. Les diaristes sont pour la plupart
des gens solitaires, mais leur écriture témoigne d'une envie commune;
cette envie de se dire, de se raconter, de communiquer son être. Au
départ, cette communication est sans issue. Devrait-elle le rester?
Les types rationnels, dont je suis, ont besoin de comprendre.
J'avoue que jusqu'à présent, je n'ai guère trouvé de réponse qui me
satisfasse. Dans bien des cas, le genre même du journal ne subit pas de
modification majeure, du moins dans la forme, lors de son passage au
web: on a beau ajouter de l'hypertexte, des cadres ou du multimédia, un
journal reste un journal. Le journal papier est encore plus versatile
au fond; il permet le dessin, le collage, la page peut être divisée
comme bon nous semble...
L'hypertexte permet peut-être une naviguation particulière, mais
rien n'empêche le diariste de jouer avec les couleurs, de renvoyer à
certaines entrées ou d'ajouter des pages en les collant ou en les
brochant. Il s'agit au fond toujours d'un média écrit (un fichier HTML
restera toujours un fichier texte) qui n'appelle pas de modification
directe sur les modalités de l'écriture.
De leur propre aveu d'ailleurs, plusieurs diaristes web disent ne
pas ressentir de modification majeure de leur écriture dûe à
l'hypertexte. Ils disent écrire de la même manière, web ou pas, du
moins pour la forme.
Alors pourquoi choisir le web? Les même raisons
reviennent souvent: le défi de se livrer au regard de tous, d'en faire
une sorte d'expérience afin de voir si on le supportera, si ça changera
quelque chose au processus d'écriture, le plaisir de partager, de
partager sa création, sa personne, l'interaction avec les lecteurs, la
discipline que cela apporte... Les raisons varient avec les diaristes
mais elles demeurent à la base toutes les mêmes.
On m'a dit un jour qu'il ne fallait pas chercher de raison. Un peu comme toute oeuvre d'art, le journal est de trop,
il ne s'explique pas, du moins pas avec des critères rationnels et
justifiables. En y réfléchissant bien, on trouve au fond plus
d'arguments contre le journal en-ligne que pour; c'est risqué de
s'offrir en pâture à la face du monde, certains diaristes l'ont
d'ailleurs découvert. Cela demande certes une grande discipline et un
certain travail. Un journal personnel peut être aussi bâclé qu'on le
souhaite et personne ne trouvera rien à redire. Mais un journal web?
Certains diaristes, il faut l'avouer, ne semblent pas se poser la
question. A l'instar des pages personnelles qui sont de plus en plus
faciles à créer et à installer sur le réseau, les journaux web pullulent
parce qu'ils sont possibles. L'écriture n'est pas toujours
soignée, pas plus que la mise en page, et le contenu fait cruellement
défaut. Certains journaux ne semblent pas avoir une motivation très
poussée; on était curieux, tout le monde le fait, on aimerait avoir un
site mais on ne sait pas de quoi parler, on a envie de parler de soi à
la face du monde... La plupart des journaux de ce genre n'atteindront
jamais l'âge respectable -pour un journal en-ligne du moins- d'un an.
Diane Patterson a d'ailleurs écrit un article au titre éloquent sur ce
type de journaux, Why web journals suck.
Il y a certes d'autres diaristes qui sont là pour rester; déjà,
certains journaux ont plus de deux ans, d'autres entament même leur
quatrième année d'existence. Certains journaux web sont très pensés et
leurs raisons très poussées. La chose demeure subjective et livrée au
jugement du lecteur et du diariste, mais il demeure que ces derniers
journaux sont bien souvent les plus intéressants -et les plus rares,
malheureusement.
C'est probablement l'aspect que l'on note en tout premier lieu: le journal web est public.
La plupart des diaristes web avouent leur plaisir d'être lu. Le
journal est une forme intime, d'accord, mais constitue néanmoins une
forme de création et donc, d'une certaine manière, un spectacle.
Certains diaristes se font presque humanistes et expliquent ce besoin
d'être lu par une envie de partager leur expérience. «Les vies
universelles» ainsi exprimées sur le web visent davantage à faire
évoluer le lecteur vers de nouvelles connaissances de la vie qu'à
exhiber son intimité au vu et au su du réseau -c'est du moins ce que
certains semblent prétendre...
Le public du journal intime tel qu'on le connaît est son auteur
lui-même. Ce public en est un de tolérance
et de compréhension du sujet. Or le public du web risque d'en aller
tout autrement. Et la
critique, surtout dans le cas de récits de vie, est parfois difficile à
accepter. Le diariste a
donc tout intérêt à modifier son écriture, à censurer certaines parties,
à en travailler d'autres. Certains le font; d'autres pas.
Certains diaristes sont si enthousiastes à l'idée d'avoir enfin
un public qu'ils vont même jusqu'à proposer à leurs éventuels lecteurs
de les aviser par courrier électronique, via une liste d'envoi, de la
publication de nouvelles entrées. D'autres diaristes tiennent leur
journal pour garder le contact avec des amis éloignés et écrivent
expressément pour ce public bien connu.
Paradoxalement, certains diaristes répugnent à penser que le
journal pourrait devenir célèbre ou s'attirer un grand nombre de
visiteurs. Je crois que cela s'explique par une certaine peur de perdre
le contrôle; une dizaine de lecteurs, ça n'a rien de menaçant... Le
courrier électronique aidant, ils finiront par se faire connaître, par
devenir des amis et le diariste sait presque quotidiennement à qui il
écrit. Lorsque le journal gagne en popularité, le nombre de visiteurs
augmente et du coup ce que le diariste espérait au départ finit par
l'effrayer. Souvent, quelques critiques négatives s'ajoutent à ce
traffic; le diariste se sent menacé, sur la défensive. Parfois, c'est
suffisant pour le convaincre d'arrêter la rédaction du journal.
Des questions de discrétion sont soulevées par une telle
écriture. Un journal ne parle pas que de celui qui l'écrit, mais de
tous ceux qui l'entourent. A-t-on vraiment envie que ses connaissances
sachent ce que l'on pense d'Un-Tel? Et si Un-Tel lui-même venait à lire
nos montées de lait à son égard?
Certains diaristes ont prévu le coup et demandent, sur leur page
d'accueil, que ceux qui les connaissent personnellement passent leur
chemin. C'est faire preuve d'une grande confiance à l'égard de la
nature humaine! D'autres diaristes n'ont pas su survivre à la
critique; certains commentaires virulents à l'égard des opinions de
l'auteur, que ce soit de la part de connaissances ou de visiteurs
inconnus, ont convaincu certains diaristes web de s'arrêter de publier.
Pourtant un journal web est aussi une façon d'être anonyme -en
procédant par pseudonyme, ce que la majorité font. Qu'importe si votre
tendre moitié lit vos secrets le plus intimes sur Internet, si elle
ignore qu'il s'agit bien de vous? Toutefois, qu'on ne se leurre pas;
l'anonymat total, complet, est un leurre. On finira bien par faire le
lien si vous mentionnez ce que vous avez fait dans votre journée, si
les états d'âme racontés ressemblent un tant soit peu aux vôtres. Il
deviendra difficile de ne parler ni travail, ni copains, ni amours. Nul
n'est une île et vous finirez bien un jour par parler de ce qui vous
est extérieur...
Et ce jour-là, vous risquez fort d'être démasqué...
J'avais l'habitude de publier certains extraits de mon journal sur ce
site -j'ajoutais même quelques extraits rédigés expressément pour mon
mini journal web, de temps en temps. J'ai abandonné cette idée
récemment; l'idée des journaux web a quelque chose de séduisant, mais
elle est en même temps trop chargée d'un sens qui me fait hésiter.
J'avais envie au départ, d'être lue; c'est bien souvent la raison
première du journal web. «Partage», «interaction», «expression»; tous
de jolis mots qui cachent une même idée, ce besoin d'être lu, connu,
apprécié.
Je me disais également que ce serait intéressant pour une fois de
tenter de ne pas penser à ce que les autres diraient; me forcer à
publier intégralement mes états d'âme m'aiderait peut-être à ne plus me
soucier autant du regard des autres. Pourtant, chaque fois, le
contraire se produisait. Chaque fois, les doutes et les hésitations
l'emportaient sur ce désir, ce besoin de franchise. Chaque fois, je
finissais par regretter mes envolées intimistes, au point parfois de me
censurer et d'effacer carrément l'entrée trop personnelle.
À quoi bon, donc? À quoi bon écrire si ce n'est pour être franc?
Mais la franchise totale, sans limites, n'a probablement pas sa place
sur le web. Elle est tout à fait dans son élément sur le papier mais
ici, au vu et au su de tous...? Je ne suis pas sûre que ce soit pour
moi. D'autres le font, et avec brio, et je les admire. Mais je préfère
encore tout dire en secret qu'en dire la moitié à la face du monde.
Ce n'est au fond qu'une question de priorités. Les diaristes web
ont moins besoin de se comprendre que de partager. Ils veulent être,
mais pas dans cette chambre à soi . Ils ont besoin que d'autres
sachent qu'ils existent, que d'autres comprennent ce qu'ils vivent. Et
ils ont le courage de leurs mots, et je les admire. Mon journal est
intime dans tout ce que le terme a de secret et de pas racontable.
Il est ennuyeux et il se répète. Il est parfois confus, dense et
complexe. Il est parfois plus anecdotique que ma liste d'épicerie. Je
ne peux pas le donner à tous. J'ai essayé. Mais mon but n'est pas de
raconter et de partager; je vise plus l'introspection que le partage,
plus le dialogue intérieur que l'expression à la face du monde. Comme
je le disais, c'est une question de priorités...
Et puis soyons francs, les journaux en-ligne sont à la mode.
Tout le monde veut son journal, mais j'ai parfois l'impression qu'on ne
saisit pas exactement l'importance que cela peut avoir. Le web n'a rien
d'intime. Le web, c'est une publication pure et simple, au même titre
que n'importe quelle publication papier. Est-ce son statut virtuel, si
facile à atteindre, qui le rend si attirant? Je l'ignore. Mais le seul
fait que c'est possible de le faire semble convaincre bien des gens de
s'y adonner. Plusieurs le font très bien, avec un effort et un travail
qu'on ne peut qu'admirer. Ce n'est malheureusement pas le cas de tous
et les journaux bâclés sont de plus en plus nombreux... Les mises à
jour trop rares, les graphiques vite faits, l'orthographe négligée et
surtout un contenu très, trop, mince... Appellez-moi la puriste; je le
suis. Mais je crois que ce mérite d'être publié mérite au moins un
minimum d'efforts, et je n'en démords pas. Ecrivez ce que vous voulez
dans l'intimité de vos papiers; si vous tenez à le publier, faites un
effort.
Oui, c'est vrai, de temps en temps, les web journals suck.
C'est pourquoi cette page est la seule sur mon site à traiter de cet
aspect de l'écriture intime. Je ne veux pas insister sur cet aspect de
l'écriture qui n'interroge pas l'écriture elle-même, qui se prend pour
acquis et a quelque chose d'un peu paresseux.
La quantité de journaux web -et de sites qui portent sur les journaux
web- rétrécit comme une peau de chagrin. Il faut croire que c'était
simplement une mode... Voici néamoins quelques survivants.
- Apologies inutiles et petites lubies sans façons
- Un journal intelligent, bien écrit, et mis à jour régulièrement. Un plaisir à lire.
- Dreaming among the jade clouds
- La présentation graphique séduit, et les propos tenus dans le
journal ne nous séduisent pas moins. À noter, un projet
autobiographique intéressant, où l'image est judicieusement mise à
profit. Un très beau journal.
- Tangerine
- J'aime bien ce journal, qu'on sent réfléchi et travaillé. En prime, une présentation graphique soignée et sobre. Apaisant.
- Yahoo! - Communications - Writing -Journals and Diaries
- Liste de journaux web du répertoire Yahoo! -534, selon le dernier compte.
- It's so damn hard being me!
- Parodie de journal web s'acharnant sur le côté un peu misérabiliste du genre. Amer, mais amusant.
- Diarist.net
- Ce site contient un petit guide démographique des diaristes
web, des "échantillons" de journaux web, et en prime, des liens vers les
motivations exprimées par plusieurs diaristes.
-
L'écriture est la seule forme parfaite du temps.
Jean-Marie Le Clézio
Ecrire, ça semble si facile... Un crayon et un peu de papier, et
tout est réglé ! Mais les passionnés du journal tiennent souvent à
aller plus loin. Les exercices d'écriture, lectures et trucs peuvent
aider à tirer davantage de l'écriture d'un journal. Pourquoi ne pas en
profiter ? Cette section vous aidera à vous y retrouver dans un domaine
où tout se bouscule souvent, tant le journal est tentaculaire. Ne vous
laissez pas impressioner : plongez joyeusement !
- De la plume au cahier
- Tous les diaristes vous le diront: inutile d'y songer si vous
n'avez pas le cahier, la plume, l'encre parfaite! (Les diaristes sont
des gens biens capricieux...) Découvrez également les logiciels du journal intime, pour les diaristes qui ont la plume technologique. Confidentialité assurée!
- D'accord, mais par où je commence?
- Ca semble si facile, au départ.... Mais c'est facile de se
laisser paralyser par ces petits obstacles agaçants! Quelques idées
pour ne pas se laisser intimider par la page blanche.
- Idées du jour
- Journée ennuyeuse? Pas de potins pour alimenter votre journal?
Ces idées d'écriture de diaristes d'un peu partout vous aideront
sûrement. Pas question de s'arrêter d'écrire, même quand l'inspiration
fait défaut!
- Du temps pour écrire
- Evidemment, on n'en sort pas! On voudrait bien avoir le temps
d'écrire notre vie... Mais voilà, il faut aussi la vivre! Quelques
idées pour arrêter de remettre notre journal au lendemain...
- Les journaux de rêves
- Ou comment le journal peut ouvrir la voie royale de l'inconscient. Ecrire peut nous aider à se rappeler, et surtout comprendre, nos songes.
- Partagé ou caché?
- Qui dit journal intime ne dit pas forcément journal secret.
Tous les diaristes ont, un jour ou l'autre, eu peur que leurs écrits
soient surpris. Et si...
- Attention : fragile!
- Vos précieux écrits méritent des soins attentifs et éclairés; encres et papiers ne sont pas éternels...
-
Les lectures du diariste
The pen is the tongue of the mind.
Cervantes
Des livres pour aller plus loin. Vous noterez que les ouvrages ne
font pas tous l'objet d'une description. C'est que je n'ai pas lu tous
ces ouvrages, mais je ne croyais pas que cela était une raison de vous
priver de l'annonce de leur existence. La plupart d'entre eux sont
également en anglais; ne m'en voulez pas, je ne suis pas responsable de
ce que les éditeurs francophones décident ou non de traduire...
- Kathleen Adams, Journal to the Self, Twenty-Two Paths to Personal Growth, Warner Books,
1990.
- Kay Adams est une figure bien connue des diaristes américains, étant l'âme derrière le Center for Journal Therapy, listé dans le carnet d'adresses.
Elle a déjà publié plusieurs ouvrages sur le sujet, mais Journal to
the Self est le plus connu. On y retrouve entre autres «la boîte à
outils du diariste», une foule de petites idées pour tenir un journal en
moins de quinze minutes par jour, lutter contre les pannes
d'inspirations ou les bloquages...
- Christina Baldwin, One to One: Self-Understanding Through Journal Writing, M. Evans &
Co., 1977.
- Deena Metzger, Writing for Your Life, A Guide and Companion to the Inner Worlds, Harper,
San Francisco, 1992.
- Marion Milner, A life of one's own
- Cet ouvrage a fait l'objet d'une traduction française sous le titre Une vie à soi (Gallimard, 1988).
- Ira Progoff, At a Journal Workshop, Writing to Access the Power of the Unconsclous and Evoke
Creative Ability, Jeremy P. Tarcher, 1975, revisé en 1992.
- Cet ouvrage a fait l'objet d'une traduction française sous le titre Le journal intime intensif
(Centre interdisciplinaire de Montréal, Editions de l'Homme, 1984).
Ira Progoff, décédé récemment, fait figure de pionnier dans le domaine.
Psychologue américain, son livre «At a Journal Workshop» a pavé la voie
à tous les autres guides sur le sujet. Il préconise une méthode
fragmentaire, où chaque thème abordé par le diariste fait l'objet d'une
section spécifique du cartable qui sert de journal. Si certains ne
jurent pas par cette méthode, tous admettent que Progoff a ouvert la
voie à une nouvelle réflexion de thérapeutes et de chercheurs sur le
journal.
- Tristine Rainer, The New Diary, How to Use a Journal for Self Guidance and Expanded
Creativity, Jeremy P. Tarcher, Inc., 1978.
- Incontournable. Rainer dirige aujourd'hui le Center for Autobiographic Studies à Pasadena, en Californie, listé dans le carnet d'adresses.
L'ouvrage, publié en 1978, surprend par sa contemporanéité. Alors que
le grand public voyait encore dans le journal un genre de jeune fille,
tout en fleurs et en bonbons, Rainer a révolutionné cette façon de voir
en lui donnant une dimension nouvelle. Un titre majeur, à souligner en
gras sur votre bibliographie.
- Marlene Schiwy, A Voice of Her Own, Fireside, 1996.
- Car et Marshall David, The Book of Myself: A Do-It-Yourself Autobiography in 201
Questions, Hyperion, 1997.
- Cet ouvrage a fait l'objet d'une traduction française.
- Sylvie Liechtele. Ecrivez vos mémoires : laissez l'histoire de votre vie en héritage. Editions de l'Homme, 1996.
- Tristine Rainer, Your Life As Story: Writing the New Autobiography, Putnam Publishing
Group, 1997.
- La reine de l'autobiographique est de retour avec cet ouvrage
publié en 1997. Après avoir fait le tour de votre journal (peut-on
jamais faire le tour de son journal?), vous aurez peut-être envie de
vous mettre en scène... Voici l'outil parfait pour y arriver.
- Julia Cameron, The Artist's Way, A Spiritual Path to Higher Creatlvity, J. P. Tarcher,
1992.
- Cameron est une des reines américaines de la créativité. Elle
est aussi l'instigatrice des populaires "morning pages"; elle recommande
d'écrire trois pages de votre journal, au minimum, dès le réveil.
Plusieurs diaristes ont sauté sur l'exercice; certains aiment, d'autre
pas, mais tous ont quelque impression à partager à leur sujet.
- Joanna Field, An experiment in leisure, J. P. Tarcher, 1987.
- Un petit livre tout à fait intéressant malgré un petit côté
psychanalytique à l'excès. Si ce point vous déplaît, sachez que le
livre a originellement été publié en 1937, ce qui le rend tout de même
assez avant-gardiste pour l'époque... L'auteure (c'est également elle
qui a publié "A life of one's own", sous le nom de Marion Milner)
s'attarde à non seulement explorer mais aussi à comprendre son paysage
intérieur par le biais de, entre autres, son journal. Une expérience
rafraîchissante sur la portée et la signification des émotions et des
sentiments.
- Natalie Goldberg, Writing Down the Bones, Shambala, 1986.
- Natalie Goldberg est une favorite chez les diaristes en ce qui
concerne l'écriture créative (je sais, il s'agit là d'une mauvaise
traduction de "creative writing", mais j'aime le son de ces mots,
laissez-les moi...). En plus de donner plusieurs ateliers, elle écrits
des masses d'ouvrages sur la question, et ses exercices d'écriture libre
(voir plus haut) plaisent toujours. Il paraît cependant que
lorsqu'elle s'adonne à la fiction, ses conseils semblent plus ou moins
porter fruit. On ne lui en demande pas tant.
- Philippe Lejeune, Pour l'autobiographie, Paris, Editions du Seuil, 1998.
- Lejeune est la figure de proue de l'autobiographie en France. Co-fondateur de l'Association pour l'autobiographie,
la liste de ses publications sur le sujet est trop abondante pour que
je la reproduise en entier ici. Mais je vous suggère quand même ce
passionnant recueil de chroniques sur l'autobiographie et le journal
intime, écrites au fil des années et toutes fascinantes.
- Sheila Bender, The Writer's Journal : 40 Contemporary Authors and Their Journals, Delta, 1997.
- Une anthologie tout à fait intéressante, qui a récolté bien des
louanges... Vous trouverez dans cette brique des journaux de tous les
genres, du carnet de notes au journal de rêves. Pour faire un tour dans
l'intimité des écrivains.
- Maurice Berne, Les plus beaux manuscrits et journaux intimes de la langue française, Robert Laffont, 1995.
- Une anthologie magnifiquement illustrée, produite par la
Bibliothèque Nationale de France. Découvrez des pages des journaux
intimes de Baudelaire, Giono, Alfred de Vigny, Sade... Une grandiose
plongée dans l'intime.
Certains de ces titres proviennent d'outils de recherche américains;
vous aurez donc peut-être de la difficulté à les trouver en territoire
francophone. Mais le net travaille pour vous; vous pourrez probablement trouver ce que vous cherchez sur Amazon.com, la Bible des bibliophiles internautes. Et puis, faites travailler votre libraire, que diable! Il est là pour ça!
Tous les liens mènent au journal
I keep on writing in the diary, subterraneously, secretly,
a writing which
is not writing, but breathing.
Anais Nin
Pour l'instant, la plupart des écrits sur le journal intime sont
rédigés dans la langue de Shakespeare. Je suis toujours à la recherche
de sites sur le sujet en français, mais pour l'instant, ma recherche
n'est pas très fructueuse...
J'ai tenté de vous donner une petite idée du contenu des sites à
l'aide de brèves descriptions mais il s'agit là d'une tâche assez
longue, et je suis sûre que vous me pardonnerez si certains vides
demeurent à combler.
Bonne visite!
Études autobiographiques
- a/b: Auto/Biography Studies
- Périodique électronique sur l'écriture autobiographique. Les
articles portent surtout sur l'aspect littéraire de l'autobiographie.
- Brave new self: hypertextual autobiographies
- Ou comment l'écriture autobiographique est-elle influencée par les nouvelles technologies, plus particulièrement l'hypertexte?
- Center for autobiographic studies
- Le site de Tristine Rainer, auteure de deux ouvrages sur le
journal intime et l'autobiographie. Un site intéressant, surtout pour
son centre de recherches sur l'autobiographie. On y cite les différents
types d'écriture autobiographique, exemples à l'appui, mais on ne parle
malheureusement pas beaucoup du journal. J'ai personnellement un faible
pour ce petit cousin de l'autobiographie; écrivains qui ne jurez que
par les mémoires, voici un site pour vous.
Articles
- Salon 21st: Baring your soul to the Web
- The Netly News: Journal-ism
- Suite 101: Exploring ourselves through journal writing
- The awesome power of the written word
Communautés virtuelles
- Journals mailing list FAQ
- Quelques informations sur une nouvelle liste de discussion
portant sur les journaux en-ligne. Très active, très intéressante et
pleine d'idées intéressantes. Il faut dire qu'elle est animée de main
de maître par Al Schroeder.
- DIARY-L
- Une autre liste de discussion, celle-là plus axée vers les
journaux web. Une foule de diaristes en-ligne y discutent éditeurs
HTML, graphisme, intimité, nouvelles idées... Si le phénomène vous
intéresse, vous y trouverez certainement votre compte.
- The ScribeTribe
- Il s'agit ici d'une liste de discussion un peu particulière.
Tous se connaissent et forment une petite communauté virtuelle très
sympathique et très chaleureuse. Les abonnés s'écrivent couramment, et
pas seulement sur les journaux mais sur une foule de sujets. C'est donc
une liste qui prendra beaucoup de place au sein de votre courrier
électronique! Si vous vous abonnez, vous aurez tout d'un coup
l'impression d'avoir plein d'amis...
Idées saugrenues
- The 1000 journals project
- Un millier de journaux intimes vierges seront dispersés à
travers le monde. Un seul journal a été retourné pour l'instant. Les
999 autres circulent toujours, depuis 2000, dans 35 pays. Les gens sont
invités à y écrire quelques lignes et à le faire circuler de nouveau.
Une idée trop originale pour être manquée. Ne manquez pas d'y aller
faire un tour, question d'en savoir plus.
Exercices
- Oral history questions
- Pas tout à fait relié au journal intime, mais vous pouvez quand
même y trouver une belle source d'inspiration. Ce site est surtout
destiné aux gens qui veulent enregistrer leur histoire familiale.
Pourquoi ne pas commencer votre journal en écrivant la vôtre?
- National Journal Network
- Quinze dollars US paieront votre abonnement au bulletin de
nouvelles de ce réseau. Si vous n'y tenez pas, vous pouvez toujours
faire le tour de ce joli site, tout rose et tout petit. Quelques idées,
des thèmes saisonniers sympathiques, des liens intéressants. Non
seulement on vous propose des exercices, mais les résultats de plusieurs
diaristes y sont présentés dans ce qu'on appelle le "journal
communautaire". Une belle idée, non? Pour les coordonnées de cet
organisme, consultez le carnet d'adresses.
- Journal Magic
- Déjà rêvé d'avoir un coach pour vous aider dans votre
écriture? Sue Meyn est là pour vous aider. Sinon, vous pouvez quand
même explorer ce site qui offre exercices et réflexions intéressants.
Achats
- Journal Depot
- Non, je ne plaisante pas. Il existe bel et bien un Journal Depot
sur le web. Vous pouvez y magasiner pour le journal parfait, dans une
foule de catégories: journaux de jardinage, de bébé, religieux,
artistiques... Et souvenez-vous que nous vivons une époque formidable.
Organismes
- Association pour l'autobiographie et le patrimoine autobiographique
- Association française qui vise non seulement à réunir les
diaristes francophones du monde entier mais également à conserver pour
la postérité leurs écrits.
- The Center for Journal Therapy
- Ce centre, basé à Denver, offre des ateliers de journal-thérapie ainsi qu'une formation pour devenir animateur de ces sessions.
- The Progoff Intensive Journal program
- Ira Progoff est considéré comme un visionnaire dans le domaine
du journal intime. Il est l'un des premiers à avoir considéré le
journal intime comme outil thérapeutique. Encore aujourd'hui, sa
méthode fait le bonheur de plusieurs adeptes.
Répertoires
- Yahoo! - Social Science - Communications - Writing - Journals and Diaries
- Et merci à Yahoo! de ne plus répertorier les journaux en-ligne sous "Entertainment - Jokes and Fun"...
- Women, Entreprise & Society
- Liste des journaux féminins détenus par la bibliothèque de l'Université Harvard.
Ateliers
- Conversations Within : Journal Writing and Inner Dialog
- Ce site se décrit comme un atelier en-ligne. Il aborde la
question des cahiers, des journaux photographiques, des ateliers
d'écriture et offre une série d'exercices à pratiquer. On y retrouve
aussi une bibliographie ainsi que quelques liens. Le site manque un peu
de substance, et ce n'est pas exactement ce que j'appellerais un
"atelier". Mais il offre quelques idées intéressantes.
- Writing the journey
- Un autre atelier d'écriture en-ligne. On y parle de techniques
d'écriture, d'exercices, de conseils pratiques et de thèmes à explorer.
La base, quoi. Un bulletin mensuel (gratuit) est également offert aux
visiteurs. On y retrouve aussi une liste très amusante de journaux
célèbres.
Ressources et réflexions
- About.com: Journals
- Un site mis à jour chaque semaine par Catherine de Cuir, qui
suit l'actualité du journal et propose une foule de petites idées très
intéressantes sur le journal intime. Si vous êtes du genre à être
fasciné par les petits détails, cette page est pour vous. On vous donne
des idées sur les cahiers et crayons à utiliser, des exercices
d'écriture, des thèmes saisonniers, avec en prime des extraits de
journaux historiques, de temps en temps... Un peu de tout, et plusieurs
choses que vous ne trouveriez pas ailleurs -comme c'est souvent le cas
sur le Web. Un excellent site, très complet et varié.
- Journal Writing Resources: Approaches To Journaling
- Site web faisant le portrait de diverses écoles de pensées en
ce qui a trait au journal intime. On y rencontre Rainer et Progoff,
entre autres. Plusieurs liens sont également répertoriés.
- The secret diary
- Une page très complète et très intéressante, mais un peu plus
personnelle. Contient quelques idées et conseils, des suggestions de
lecture et des liens vers des journaux intimes sur le Web. On y trouve
aussi une toute petite section, très intéressante, sur le statut légal
du journal intime.
- The Veech journal pages
- Pensées et conseils sur les façons de tenir son journal
personnel. Il se distingue surtout par le fait qu'il vise les gens
d'affaires et cherche à leur montrer comment tenir un journal peut les
aider dans leur développement professionnel. Un des sites qui m'ont le
plus impressionnée personnellement. Il est très complet et les
informations qu'on y trouve sont extrêmement pertinentes. L'auteur a,
entre autres brillantes idées, pensé à effleurer le sujet de
l'indexation des journaux intimes, enjeu ô combien passionnant quand
notre pile de cahiers brochés commence à ressembler à la Tour de Pise et
que l'on y cherche un passage particulier!