Réflexion
sur le deuil
Le deuil
d'abord se vit et s'éprouve. Quelle est la nature de l'épreuve à
laquelle nous confronte la mort de nos proches ? Quel sens
pouvons-nous lui donner ? Ce n'est pas par les concepts que nous
pouvons commencer à le penser, mais par l'expérience. Sans faire de
vous des experts du deuil au seul motif que vous en auriez été
particulièrement éprouvés, il me semble nécessaire de partir de
là : quelle est la place et le vécu du deuil dans nos vies ?
Et, au delà, que pouvons nous dire de cette expérience, qui est à
la fois commune à tous et toujours personnelle.
Je crois
que l'expérience du deuil estn constitutive de ce que nous sommes en
tant d'individus mais elle n'acquiert sa véritable signification que
dans l'intensité de certaines occasions, heureusement assez rares.
Parler du
deuil m'est devenu obligatoire le jour où mon petit-fils à perdu la
vie à l'âge de 13 ans. Dadi, un petit garçon plein de douceurs, un
sourire enjôleur, était invité chez un copain à dormir le soir
chez lui pour fêter la reprise de l'année scolaire 2014. c'était
le 30 août 2013 à 11 heures du soir environ. Les copains du copains
s'étaient joints à la soirée d'adolescents, une de ces soirée ou
les jeunes profitent de l’absence des parents pour s’enivrer, jouer
à la console, regarder des films violents... la jeunesse. Ils
regardaient la télévision quand une panne d'électricité vient
désorganiser leur soirée. Le copain de Dadi et deux autres dont une
fille de 16 ans et plus sont allés dans une grange à la recherche
de bougies, et lampes de poche. Ils sont revenus avec des fusils,
trois 22 long rifle chargés, ont fait irruption dans la salle à
manger, ont mis en joue Dadi qui tranquillement assis devant le petit
écran télévisuel, et qui ne se doutait pas que ce serait les
dernières images qu'il verrait, l'abatte d'une seule balle en pleine
tête. La mort cérébrale fut immédiate, mais le cœur tenait bon.
Les secours ne sont venus d'une demie-heures après, les avaient-ils
appelés immédiatement ou avaient-ils réfléchis aux conséquences
de leur acte. Qui a tirer ? Pourquoi ? Pourquoi, Dadi et pas un
autre... beaucoup de questions sans réponse. L'enquête est en
cours...
Où en
est l'enquête, aucune nouvelle. Le garçon qui a tiré à eu 2 mois
d'incarcération puis relâché, ayant pour obligation de ne pas
s'éloigner de son domicile et devant porter un bracelet
électronique.
Parce que
tout deuil est singulier, singulier à chacun, singulier dans la
relation mais surtout singulier absolu de l'être perdu. C'est un
déchirement le deuil qui est commun à tous et exceptionnel, ma
mort, votre mort, celle des autres est la règle de toute vie
humaine, exceptionnelle en ce qui se vit chaque fois comme
imprévisible et scandaleuse. Si bien que le deuil qui devrait
logiquement se penser sur le mode de la règle universelle de la
finitude humaine, ne peut en réalité se penser que sur le mode de
exceptionnelle.
-La mort
constitue, pour la pensée, nécessaire et impossible. Nécessaire, puisque toute notre vie porte sa marque comme l'ombre portée du néant
(si nous ne nous mourrons pas, chaque instant sans doute aurait un
goût différent, une lumière différente), comme le point de fuite,
pour nous, de tout.
Mais
impossible puisqu'il n'y a rien dans la mort à penser. Qu'est-elle ?
Nous ne le savons pas. Nous ne pouvons le savoir. Ce mystère ultime
rend toute notre vie mystérieuse, comme un chemin dont on ne sait où
il mène, ou plutôt on ne le sait que trop (à la mort), mais sans
savoir pourtant ce qu'il y a derrière, derrière le mot, derrière
la chose, ni même s'il y a quelque chose.
Ce
mystère, où l'humanité commence peut-être n'est certes sans aucun
recours. A la question « qu'est-ce que la mort » ? les philosophes
n'ont cessés de répondre, mais leurs réponses pour simplifiez à l’extrême, se répartissent en deux camp : les uns qui disent que la
mort n'est rien (un néant) et les autres qui affirment qu'elle est
une autre vie, ou la même continuée, purifiée, libérée...
C'est
deux façons de la nier : comme néant puisque le néant n'est rien,
ou comme vie, puisque la mort, alors, en serait une. Penser la mort
c'est la dissoudre : l'objet, nécessairement échappe. Épicure
disait la mort n'est rien et Platon lui pensait que la mort n'est pas
la mort.
Entre ces
deux extrêmes, on ne voit guère quel juste milieu serait possible,
sinon celui qui n'en est pas un, de l'ignorance avouée, de
l'incertitude, du doute, voire de l'indifférence... Mais puisque
l'ignorance, s'agissant de la mort, est notre lot à tous, cette
troisième position n'est autre chose que le prise en compte de ce
que les deux première ont de fragiles et d’inéducable. Au reste,
celle-ci énoncent moins des positions extrêmes que des propositions
contradictoires, soumises comme telles au principe du tiers exclu. Il
faut que la mort soit quelque chose ou bien qu'elle ne soit rien.
Mais si elle est quelque chose, cela, qui la distingue du néant, ne
peut-être qu'une autre vie, un peu plus sombre ou un peu plus
lumineuse, selon les cas ou les croyances de l'autre...
Bref, il y a
ceux qui prennent la mort au sérieux, comme un néant définitif
(c'est dans ce cas que l'on trouve principalement les philosophes, la
quasi-totalité des athées, des matérialistes, des
scientifiques...) et ceux qui croient au contraire qui n'y voient
qu'un passage, qu'une transition entre deux vie, voire le
commencement de la vraie (comme l’annonce la plupart des religions
et avec elles des philosophes spiritualistes ou idéalistes). Le
mystère bien sûr n'en demeure pas moins.
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