lundi 9 novembre 2015

Aujourd’hui débute la grande campagne gouvernementale contre le harcèlement sexuel dans les transports. Le titre : « Stop, ça suffit ! »

Mon vieil ami des beaux quartiers ou les "ziva" à capuche qui hantent les trains de banlieue ? 
 
 
Aujourd’hui débute la grande campagne gouvernementale contre le harcèlement sexuel dans les transports. Le titre : « Stop, ça suffit ! »
Les secrétariats d’État aux Droits des femmes et au Transport ont concocté des affichettes et un clip où l’on entend, sur fond de métro, une voix de jeune homme qui commence par les compliments et finit par « je vais te serrer… réponds, sale chienne ».

À quinze jours des élections, la chose est grave et mérite de devenir une grande cause nationale. En effet, dans un rapport rendu au gouvernement en avril dernier, « le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH) soulignait que 100 % des utilisatrices de transports en commun ont subi au moins une fois dans leur vie du harcèlement sexiste ou une agression sexuelle ». Mais comme le souligne Le Figaro, c’est « un chiffre très contesté, étant donné la faible représentativité de l’échantillon choisi » dans la mesure où il est avéré que, pour conduire cette enquête, seuls une « soixantaine de questionnaires avaient été collectés ».

C’est maigre, alors si ça peut aider, je veux bien apporter ma contribution.
Dans ma longue vie de Parisienne qui n’utilise que la marche ou les transports en commun, j’ai croisé deux dingues du métro. Le premier m’attendait planqué dans le recoin sombre de l’escalier de sortie et me sauta dessus, arrachant les boutons-pression de ma jolie saharienne blanche. J’ai hurlé si fort qu’il s’est sauvé en courant. « Traumatisée », j’allai chercher un soutien psychologique auprès de la guichetière qui me fit cette jolie réponse : « Vous aviez passé le portillon, ça ne concerne pas la RATP. » Merci madame.

La seconde fois, j’étais assise dans la rame face à un monsieur grisonnant et bien costumé, serviette en cuir sagement posée sur les genoux. Bien que raide, il était agité d’un spasme hémifacial qui semblait me faire un « zieu », comme on dit à La Réunion, et soudain il souleva sa sacoche pour m’offrir le spectacle de son anatomie fort turgescente. J’étais jeune et ignorante sinon innocente, n’ayant pas, comme bien des gamins d’aujourd’hui, été nourrie au porno. À l’arrêt suivant, je me suis enfuie en courant. Quelques années plus tard, je lui aurais sans doute dit que son matériel était trop moche pour être montré, mais que serait le plaisir de l’exhibitionniste sans les jeunes filles apeurées ?
À nos secrétaires d’État qui veillent avec tant de sollicitude sur l’intégrité exclusive de la gent féminine, je voudrais signaler quelques petites choses.

La première est que, malgré la distance, mon fils préférait rentrer à pied de ses entraînements sportifs plutôt qu’en métro. C’était avant le Marais arc-en-ciel, et la ligne 7 bis traversant les Buttes-Chaumont était alors très prisée des amateurs de jeunes gens. Je ne sache pas qu’on ait jamais fait campagne contre ces harceleurs-là.

À l’autre bout de l’histoire, je connais un monsieur d’un certain âge préoccupé depuis quelques semaines par la présence d’une jeune adolescente recroquevillée sur le trottoir, à la porte de son immeuble. Une gamine de 13-14 ans, en pleine détresse. Il n’ose pas l’aborder, pas lui donner d’argent, pas lui offrir à déjeuner, certain (à tort peut-être mais sans doute à raison) que toute manifestation d’intérêt de sa part le ferait passer pour un vieux dégueulasse cherchant à monnayer des faveurs sexuelles.

Je pose donc la question : à qui s’adresse cette campagne ? Qui est visé ? Mon vieil ami des beaux quartiers ou les « ziva » à capuche qui hantent les trains de banlieue ?
Enfin, au risque de me faire haïr, cette ultime question : qu’adviendra-t-il des femmes le jour où plus aucun homme n’osera leur sourire et encore moins leur dire qu’elles sont belles et désirables ?

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