mardi 2 février 2016

Les mots pour ne pas le dire : mère porteuse (surrogate en anglais)


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La destruction d'un monde se fait à l'aide du langage, de la novlangue, comme l'a dénoncé George Orwell dans son roman, 1984. Le principe de l'invention du langage pour imposer un nouvel ordre mondial est le suivant : on diminue le nombre de mots d'une langue, empêchant les citoyens de réfléchir, afin de créer une nouvelle réalité à laquelle ils sont désormais soumis. La disparition de mots dans une langue permet une simplification du monde, qui empêche même à toute idée critique de germer dans un esprit sans qu'aucun ordre extérieur ne soit donné et installe tranquillement une société totalitaire.

Cette destruction peut s'observer aujourd'hui dans la disparition du mot "mère" dans le discours bâti sur ce qui est appelé la "GPA". "Gestation pour Autrui".
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Or ce signe lui-même, GPA, est une création de la novlangue.
G pour "gestation". Le mot "gestation" selon le Larousse signifie : "État d'une femelle vivipare, entre nidation et mise-bas, chez les espèces gestantes". Un mot a disparu du vocabulaire, mot qui est pourtant plus adapté que "gestation" pour décrire la réalité de la femme enceinte : "grossesse". Les deux commencent par G, il a été plus facile de substituer "Gestation" (pour les animaux) à "Grossesse" (pour les femmes), réduisant ainsi les femmes à un pur état animal.

PA pour "pour autrui". L'expression par redondance ("pour" + "autrui") connote le don et la gratuité alors qu'il s'agit d'une transaction marchande, entre des acheteurs et des commerçants (agences et cliniques, consultants en tout genre) qui conçoivent et exécutent un contrat dans lequel est négocié l'achat et la vente d'un bébé via la location de l'utérus de la mère.

"Gestation pour Autrui" n'a donc pas de sens : le sigle correspond à un travestissement de la réalité.
Pendant un temps, il fut dit : "Mère porteuse", pléonasme fabriqué à dessein puisqu'une mère est toujours porteuse : l'expression sous-entend qu'il y aurait des "mères porteuses" et des "mères non porteuses". Mais ces mères qui portent l'enfant sont celles qui accouchent de l'enfant, par conséquence ce sont des mères. Donc pourquoi ajouter "porteuses" ?

Pourquoi ? Parce que, par un jeu de langage, en mettant deux mots, "mère" et "porteuse", elle devenait "sécable", puis "effaçable". En effet, quelque temps après, il suffirait de ne l'appeler plus que ... "porteuse". En langue anglaise, il est courant de dire simplement : surrogate.


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Par une atroce ironie, c'est la langue de l'éthique qui va être chargée de briser cette unicité entre le fait de porter et le fait d'être mère. Ainsi, des articles, des conférences, voire des débats sont désormais organisés et placés sur le terrain "bioéthique", sur le thème "Porter l'enfant d'un autre". L'on pose cela en titre, puis l'on propose à la discussion la qualification d'un tel fait, se demandant par exemple si "porter l'enfant d'une part" serait un acte d' "asservissement" ou un acte de "solidarité" entre le fertile et l'infertile.

La question a été déplacée.
Par ce déplacement de la dispute (est-ce bien ? est-ce mal ?), le discours élaboré a transformé le monde, présentant la maternité de substitution avec un personne qui n'est plus la mère de l'enfant mais ce personnage secondaire, la "porteuse" de celui-ci. L'essentiel est gagné : la mère n'est plus rien, puisque le mot a disparu : elle est une "porteuse".
Or rappelons que la mère est celle qui porte l'enfant et qui accouche. Peu importe "l'intention" qui l'anime ou qu' "une autre" ait quant à elle l'intention d'avoir un enfant. Ainsi, dans le Code civil, la femme qui accouche sous X et n'a donc pas "l'intention d'être mère" est qualifiée de "mère" par la loi. Parce qu'elle l'est.
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Les promoteurs de la pratique ce que chacun est doucement appelé à nommer GPA, savent qu'en gagnant la bataille du langage ils remporteront la bataille du Droit. Une Loi, c'est fait pour être abrogée. Pour cela, il faut d'abord passer par le langage de l'éthique. Le décalage du Code civil n'aura ainsi fait qu'apporter la preuve de son archaïsme : on réclame de la modernité.
Certes, les scientifiques vont ensuite faire remarquer que la femme qui porte l'enfant en demeure biologiquement la mère car pendant les 9 mois elle échange avec l'enfant tant d'informations et de cellules qu'ils ont un lien de filiation insécable.

Mais l'efficacité de la novlangue par la réduction du monde se poursuit.
Puisque les discussions éthiques n'auraient plus vocation qu'à porter sur le sort fait aux "porteuses" déchues de leur statut de mère, il faudrait faire en sorte que cette "délivrance" de l'enfant entre la "porteuse" et ceux qui attendent l'enfant ne se fasse plus par la mise en "esclavage" de la "porteuse", qu'elle reçoive sa part financière de la transaction, qu'elle soit suivie, qu'elle ait des droits multiples. Cela dans un "souci éthique". Non seulement le débat est déplacé, mais il est organisé pour que chacun aille dans le "bon chemin".

La réduction du monde par le langage a permis d'évacuer toute critique, et entraîne la soumission de chacun il à son espace clos. Le seul espace laissé au Droit par la novlangue est le suivant : il faut que le Droit, qui réapparait dans ce "corridor langagier", soit "éthique", c'est-à-dire qu'il fasse en sorte que la porteuse ne soit pas une "esclave" ; ainsi le Droit "éthique" va contraindre les femmes à exprimer leur souci des couples infertiles en montrant leur générosité.

Le mot est lâché : les femmes, puisqu'elles ne sont plus des mères, se doivent de "donner". Comme elle ne peut donner que ce qu'elle porte, la femme devra signer un contrat, qui protestera qu'elle ne donne pas son enfant, puisqu'il n'est pas d'elle : elle fera un "don de gestation", le Droit ayant simplement pour office de s'assurer que la GPA est "éthique", c'est-à-dire que la "porteuse" reçoive de l'argent, mais pas trop, qu'elle fasse un "don magnifique", bref que la GPA soit un lien d'amour.
Ceux qui diraient le contraire seraient contre l'amour, ou bien seraient pour l'esclavage. Le résultat du jeu de langage est : "GPA altruiste, éthique, et solidaire". Voilà comment les femmes sont vendues et livrées sur le marché, avec leurs bébés.

La novlangue, appuyée sur l'éthique et le droit, permet ainsi d'installer le marché mondial des femmes et des enfants, les pays capitalistes allant demander aux femmes pauvres "solidaires" et "généreuses" qui y "consentent" contre une "petite compensation financière", de fabriquer l'enfant sans mère, né du seul désir qu'ils ont d'être ses "parents", titulaires de l'intention, désir transformé en "droit à la parentalité" par les agences qui construisent par les mots le marché de l'inhumain.
Tout cela est possible, car le mot "mère" a disparu. La mère n'existe plus, elle a été tuée par le langage.
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A nous de mettre des mots sur cette chose : achat et vente de bébés par Internet, contrat de location d'un utérus, et vente du bébé, organisée par les firmes mondiales qui masquent la réalité effrayante dans laquelle nous sommes entrés: notre novlangue invente un monde qui vend et achète des femmes et des bébés et ne reconnaît plus de mère pour son enfant.

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